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Il voulait donc que ce voyage, en même temps qu’utile à ses affaires, se transformât, avec l’aide de Sulpice, en un cours pratique d’histoire naturelle pour ses enfants, qui arriveraient à Mexico l’esprit meublé des connaissances les plus diverses et la mémoire pleine de souvenirs intéressants.

L’itinéraire, étudié d’avance, commençait par une longue course dans les forêts, à la recherche des coupeurs d’acajou, d’une visite aux ruines d’une ville indienne récemment découverte, que l’explorateur avait nommée Lorillard, ville située quelque part sur la rive gauche de l’Usumacinta supérieur, d’un arrêt à Ténosiqué, puis de la descente en canots jusqu’à Frontéra, port d’entrée de la province de Tabasco. On remonterait ensuite à la capitale San Juan Bautista pour gagner Palenqué, traverser la cordillère et se reposer à San Cristobal. De là on descendrait dans la vallée de Chiapas, on franchirait, la montagne de la Ginéta pour atteindre Téhuantépec et plus loin Mitla, dont les palais indiens sont si connus.

D’Oaxaca jusqu’à Mexico, ce n’était plus qu’une promenade ; on verrait dans le parcours Puebla, la ville des anges, la grande pyramide de Cholula, les volcans, puis la vallée de Mexico. Ce voyage serait donc une véritable exploration, dont les enfants conserveraient des souvenirs vivaces et vivants, car, outre les collections que se promettait Sulpice, François emporterait ses appareils photographiques pour recueillir les vues des paysages les plus intéressants, ainsi que celles des palais et des temples indiens. Le voyage résolu, il fallait s’occuper des préparatifs, et ce n’était pas une petite affaire : c’est que dans ces parages lointains il n’existe pas de route et par suite pas de voiture. La route, c’est un étroit sentier où l’on s’engage à la file indienne, sentier souvent incertain, capricieux, que modifient sans cesse un accident, la saison, un orage, la chute d’un arbre ou le cours d’un ruisseau.

C’est donc à mule et à cheval que l’on voyage ; quelquefois c’est en palanquin pour les dames, ou simplement sur une chaise, à dos d’homme, ainsi que nous le verrons plus tard. De plus, il faut choisir son temps, car pendant la saison des pluies on éprouve