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A TRAVERS LES FORÊTS VIERGES.

mit pied à terre et l’on fût obligé de décharger les mules pour diminuer leurs fardeaux de moitié, de sorte qu’il leur fallut deux fois gravir les pics.

François, loin de se plaindre, accepta celle épreuve en riant ; il marchait près de son père, sautant de rocher en rocher, se moquant de Pétronille et de Sulpice qui n’en pouvaient, faire autant et prenant, par la bride la mule d’Ëléonore, qui se comportait en vaillante bêle ; Frémont lui recommandait, en vain de ménager ses forces : le gamin continuait ses cabrioles jusqu’à ce qu’enfin, rouge, épuisé, mourant cle soif, il fut obligé de s’arrêter.

« Chi va piano va sano », dit Sulpice.

Heureusement la montagne devenait moins rapide et l’on put confier l’enfant à Morcillo, sur le dos duquel il atteignit le sommet. Là on attendit l’arrivée des mules, qui avaient dû retourner sur leurs pas pour y amener le complément des charges.

Mais l’eau manquait toujours, on n’en aurait, que le soir en atteignant le Yalchilan. Le pauvre François souffrait affreusement, encore qu’il refusât de se plaindre.

Il y avait du vin et Frémont eut bien envie d’en ouvrir une caisse ; mais il craignit d’irriter encore la soif de son fils, lorsque Bénito, à qui les souffrances de son jeune maître étaient intolérables, se mit à parcourir les environs, à la recherche des lianes à eau, qu’il connaissait de longue date et qu’il savait exister clans ces parages. Bientôt il poussa un cri de triomphe et revint courant auprès de son petit ami.

« 

Viens, Tailla ; venez, mon maître, j’ai trouvé de l’eau ; prenez vos jicaras ; tu vas boire, Panchito, tu vas boire. »

L’enfant poussa un cri cle soulagement ; l’Indien l’avait pris par la main et, suivi de Sulpice et de Frémont, l’emmena à quelque dislance dans le bois, où cle grandes lianes s’entre-croisaient d’un arbre à l’autre et tombaient jusqu’à terre. « 

Caspita ! dit Sulpice, comment n’avais-je pas pensé à cela !

Je n’y avais pas pensé non plus, dit Frémont.

Mais moi, j’y ai pensé, fil l’heureux Bénilo. Préparé la tasse, Panchito : attention ! » Et d’un coup de son machété il trancha