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HISTOIRE

derrière le dos, et le corps étroitement serré avec de larges bandes, de peur qu’il ne fût suffoqué tout d’un coup. On le descendait ensuite la tête en bas dans la fosse, où on l’enfermait jusqu’à la ceinture par le moyen de deux ais échancrés qui lui ôtaient entièrement le jour. Dans la suite, on laissait à ceux qu’on y suspendait une main libre, afin qu’ils pussent donner le signal qu’on leur marquait, pour faire connaître qu’ils renonçaient au christianisme, et l’on remplissait souvent la fosse de toute espèce d’immondices qui causaient une infection insupportable. Mais il n’était pas besoin de rien ajouter à ce tourment pour le rendre le plus cruel de tous ceux qui avaient été inventés jusque-là. On y souffrait un étouffement continuel : le sang sortait par tous les conduits de la tête en si grande abondance, qu’il fallait avoir recours à la saignée pour l’arrêter, et l’on sentait un tiraillement de nerfs et de muscles qui causait une douleur au-dessus de toute expression. Malgré cela, on y vivait quelquefois neuf et dix jours de suite.

Dans cette même année, la plus fatale de toutes à l’Église du Japon, cinq Jésuites, quatre Dominicains et deux Augustins furent suspendus dans la fosse ; ces six derniers étaient entrés depuis peu au Japon, et venaient des Philippines. Le