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HISTOIRE

n’être fondé que sur de vaines conjectures, faisait juger à tout le monde que ce calme précédait un grand orage. Il fut encore confirmé par la découverte miraculeuse de deux croix, qui furent les instruments de plusieurs merveilles.

Les malheurs de la religion vinrent en grande partie de la conduite du roi d’Arima. Ce prince, que l’on avait vu, dans les temps les plus difficiles, prendre en main les intérêts du christianisme avec un courage et une ferveur qui excluaient même tout calcul de prudence, n’était plus le même homme. L’ambition l’avait fait consentir au divorce du prince : Suchendono, son fils aîné, avec la princesse Lucie, nièce de Tsucamidono, pour épouser une petite-fille du Cubo-Sama. Cette princesse idolâtre fut une furie qui remplit sa maison de troubles et d’horreurs. Elle corrompit d’abord le cœur de son époux, lui fit abandonner sa religion, et lui inspira un tel désir de régner, qu’il ne craignit pas d’aller dénoncer son père au Cubo-Sama, l’accusant de trahison et d’autres crimes imaginaires. Sans entendre le roi d’Arima, le Cubo-Sama l’envoya en exil et fit passer sa couronne à son fils. La jeune reine n’était pas encore satisfaite, elle chargea son beau-père de nouvelles imputations, et le Cubo-Sama, qui allait se déclarer contre les chrétiens, saisit avec empressement l’occasion