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une grande et belle chapelle des pénitents blancs, où la vie de Jésus-Christ depuis sa résurrection, est peinte, en huit grands tableaux, par Mignard et Parrocel.

Je finis par la salle de spectacle, petite, mais bien ornée et bien bâtie, et par un superbe carrosse de parade du vice-légat. Il a huit glaces, le fond étant tout pareil au devant ouvert glacé de même, doré à plein jusqu’aux roues, force cartisanes d’or, la peinture de Parrocel. C’est le plus beau que j’aie jamais vu ; il coûte quarante mille livres.

En avez-vous assez sur Avignon ? Je vous fais grâce cependant de plusieurs autres articles qui me reviennent. N’allez pas vous figurer que je serai de la même longueur sur toutes les villes et peintures d’Italie ; ce ne seroit jamais fait. D’autres en ont assez parlé ; mais j’ai voulu un peu m’étendre sur celle-ci, dont on n’a pas tant écrit. D’ailleurs, dans mon état de secrétaire des quatre Facardins, je suis possédé d’une ferveur de novice qui constamment ne sera pas la même. Ajoutez qu’un homme ici nous fait voir une pierre d’aimant grosse comme le poing, qui n’enlève qu’une petite clef, quoique bien armée ; mais le corps qu’elle a attiré attire ensuite quatre fois plus que la pierre même.

Le duc d’Ormond, jadis si fort en faveur en Angleterre, achève de manger à Avignon le fond de 800 mille livres de rente ; c’est le séjour des vieux ruinés, car M. de Langeac s’y est aussi retiré.


LETTRE III

AU MÊME


Route d’Avignon à Marseille.
Marseille, 15 juin.


Le 8, à cinq heures du matin, nous nous séparâmes en deux bandes. Sainte-Palaye, en sa qualité de protecteur de tous les vieux sonnets, voulut aller sur les bords de la fontaine de Vaucluse, pleurer avec Pétrarque le trépas