Page:Charles de Brosses - Lettres familières écrites d’Italie - ed Poulet-Malassis 1858.djvu/290

Cette page n’a pas encore été corrigée


Le Vésuve a deux sommets, l’un méridional, où est le volcan actuel et sur lequel j’étois ; l’autre septentrional, appelé Monte di Somma, oîi le volcan a certainement été. Il est roide et perpendiculaire de son côté intérieur, assez semblable à une muraille brûlée et ruinée, enveloppant à demi-cintre le sommet précédent : ce qui me fît aussitôt conjecturer que le cintre, autrefois entier, s’étoit écorné et ruiné à la longue, à force de feu et de mines ; que le Somma étoit le Vésuve des anciens, à un seul sommet, dont le cratère avoit un prodigieux diamètre, et que notre Vésuve étoit une montagne nouvelle, formée de l’amas de matériaux que le gouffre lance depuis sept siècles, et qui, retombant sur eux-mêmes, ont formé le second sommet, proprement le Vésuve d’aujourd’hui, comme un coqueluchon au fond d’une tasse.


Ces conjectures paraîtroient trop hardies aux gens qui ne sont pas faits aux grandes opérations de la nature ; mais non pas à vous et à notre cher Buffon, qui connaît, mieux que personne, la construction de notre globe et les révolutions auxquelles il est sujet.


Il peut se faire que la terrible éruption où périt Pline, ait fait sauter la voûte, le cacumen de la grosse montagne et ait commencé bien fort à écorner les bords de la tasse ; du moins savons -nous qu’avant cet événement, du temps d’Auguste, le sommet du Vésuve étoit plein et presque plat.


Le gouffre actuel a la forme d’un- cône renversé, ou d’un verre à boire, terminé dans son fond par une plaine Tougeâtre, d’environ cinquante toises de diamètre et légèrement crevassée en quelques endroits ; le sol en paraît être de soufre et de mine de fer : les parois intérieurs de la tasse sont de rocher vif, scabreux, brûlés jusqu’à calcination comme de la chaux, blanc, citron, recouvert en mille endroits de soufre pur et de salpêtre, en d’autres endroits, tendant à vitrification, en quelquesuns ferrugineux, presque partout fendu de longues crevasses, d’où sort une grande quantité de fumée mal odoriférante. Vous jugerez encore mieux de la qualité du sol, à la vue de plusieurs petits morceaux des différentes espèces que j’ai fait ramasser, et que je vous montrerai.


L’orifice du volcan peut avoir, à ce que l’on m’a dit, trois centcinquantetoises,dansson plus grand diamètre, d’orient