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en ces deux villes, et je m’assure que vous serez de mon sentiment : à cela près, Naples mérite la préférence. Le climat y est tout autrement riche et riant ; sa baie est si bien ramassée qu’on en voit tout le tour d’un coup d’œil. Le coteau de Pausilippe la termine d’un côté, de l’autre le mont Vésuve, et plus loin le cap de Sorrento, en face l’île de Caprée, la ferme et fait perspective à la ville. Tout le long, depuis le Pausilippe jusqu’au môle du château de rOEuf, règne une espèce de large rue appelée la Piaggia (la Plage), vulgairement Chiaja, bordée de maisons d’un côté et de l’autre ouverte sur la mer. C’est véritablement un des beaux aspects qu’il y ait ; aussi le vante-t-on beaucoup et on a raison : mais je ne puis souscrire de même aux éloges merveilleux que Misson et autres voyageurs donnent aux édifices publics et à la ville en général. S’ils veulent louer les églises pour leur grand nombre et les richesses immenses qui y sont prodiguées, j’en suis d’accord ; pour le goût et l’architecture, c’est autre chose : l’un et l’autre sont à mon gré la plupart du temps assez mauvais, soit qu’ils le soient en effet, comme je le crois, ou que, comme on juge de tout par relation, j’aie les yeux trop gâtés par les véritables beautés des édifices de Rome. Les dômes sont oblongs, de vilaine forme, sans lanterne au-dessus, les tremblements de terre les aj’ant renversés, en un mot de vrais Sodomes (sots dômes). Véritablement les maîtres-autels, et surtout les tabernacles, y sont dignes de remarque, superbes et ornés de marbres et de pierres préciieuses, avec une étonnante profusion. J’en dis autant des palais des particuliers que des bâtiments publics ; ils n’ont point au dehors cet air de noblesse qui prévient, si l’on en excepte un petit nombre, comme ceux de Caraffa, de Monte-Leone, et principalement celui de Montalte, bâti avec des péristyles, galeHes et colonnades, sur le bord de la mer : c’est un grand et beau morceau. Tous les combles des maisons sont en terrasses, pavées de dalles, liées d’un ciment de pouzzolane. Franchement, cela ne me plaît point de voir ainsi toutes les maisons sans toit ; il me semble toujours qu’on vient de leur couper la tête : c’est peut-être un effet de l’habitude. Je no le pardonne qu’à celles “qui sont terminées par des balustrades.


La rue de Tolède est certainement la plus longue et la