Page:Charles de Brosses - Lettres familières écrites d’Italie - ed Poulet-Malassis 1858.djvu/260

Cette page n’a pas encore été corrigée


seront pas de grand usage ; je m’en console aisément, j’en ai quantité d’autres, entre autres du prince de Campu Fiorido, qui m’en a donné à Venise pour toute sa famille. Il me semble qu’il y a déjà longtemps que je suis parti de Rome, et cependant je n’ai encore fait que douze milles. Il se fait tard néanmoins, et nous avons de grands bois h traverser pendant Wob.scurité. Là-dessus nous avons imaginé de faire monter à cheval quatre domestiques avec des flambeaux, pour courir devant nos chaises. La nuit, l’épaisseur des forêts, la lumière de ces torches, l’air diabolique de nos postillons joint à la mine peu orthodoxe de ceux qu’ils conduisoient, tout cela mis ensemble formoit un spectacle très-singulier ; c’étoit une magie admirable qui nous amena à Velletri, dont je ne dirai rien, parce que nous ne le vîmes pas. Ce fut mal fait, car il y a quelques choses assez bonnes, entre autres le palais Ginetti.


Le 29, nous suivîmes le pied de la montagne, laissant à droite l’ancien Palus Pomptina, autrefois si fertile, aujourd’hui plaine absolument déserte, sans une seule plante ; elle est marécageuse, empestée, en un mot hideuse à voir ; elle s’étend jusqu’à la mer, le long de laquelle cJn trouve Antium [Nettuno] :

.‘Eœœque insula Circes.


Nous ne vîmes rien de tout cela, qui n’étoit point sur notre route (et ce seroit bien fait d’y passer à notre retour, pour l’amour de l’antiquité) ; seulement, lorsque nous fûmes vis-à-vis de la demeure de feu mademoiselle Circé :

Proxima raduntur Ciiceœ littora terrse, je voulus lui faire des remercîments de votre part de ce qu’elle ne vous avoit pas mis autrefois au perdouillet, et je prêtai l’oreille pour voir si je n’entendrois point

Hinc exoriri gcmitus irce que leonuni

Vinela recusantùm, et sera sub noctc rudcntûm

Ssevire ; ac forraœ magnorum ululaïc luporum.


Mais j’eus beau faire, je n’entendis rien. Le pays est si détestable, qu’il n’y a pas jusqu’aux sorciers qui ne