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Lo \8, nous descendîmes la montagne ; je crus que cela ne fmiroit jamais, et qu’elle descendoit jusqu’aux antipodes : le mauvais chemin et les roches désertes contribuoient, je pense, beaucoup à me la faire trouver si longue. Enfin, après avoir traversé dans, le fond de la vallée un large torrent, nous quittâmes les États du Grand-Duc pour entrer dans ceux du Pape, et prîmes congé pour longtemps de ces vilaines montagnes pelées. Je puis bien assurer qu’il n’y a pas un homme dans le monde plus mal en Apennins que le Grand-Duc. Il semble que cela lui soit affecté ; car, dès que nous eûmes passé le torrent, nous retrouvâmes les montagnes chargées d’arbres et de verdure : pour les chemins c’est la même chose, ils sont tout aussi mauvais dans l’un des États que dans l’autre. On ne peut rien de plus détestable ni de plus fatigant que la route de Sienne jusqu’au lac de Bolsena. C’est une indignité que des souverains laissent des chemins dans un pareil état ; mais ce qui me parut plus original par rapport à nous, c’est qu’à chaque poste où nous arrivions moulus de coups, on nous faisoit acquitter un péage pour avoir de quoi les raccommoder unjour à venir. Nous ne sommes pas dans l’intention de retirer jamais l’intérêt de notre argent ; au contraire, notre dessein, au retour, est de passer par la marche d’Ancône pour éviter cette mauvaise route, et voir un nouveau pays. Ceci nous allongera le chemin d’une quarantaine de lieues ; mais c’est une bagatelle sur une traite comme la nôtre. Continuons notre route de ce côté.


Nous montâmes par une échelle à la petite ville d’Aquapendente ; de là nous tirâmes vers le beau lac de Bolsena, et dès que nous l’eûmes joint, nous trouvâmes de jolis paysages et des chemins fort neufs.


Je ne vous dirai rien de la ville de Bolsena ni de celle de Montefîascone. Cette dernière est dans une jolie situation, sur une hauteur entourée de vignes, qui produisent de célèbres vins blancs. Je n’entrai pas dans la ville,, et je poussai jusqu’à Viterbo (trente-deux mille) que je ne fis non plus qu’entrevoir, y étant arrivé tard et parti de grand matin, mais, pour le peu que j’aperçus, la ville me parut bien bâtie et ornée de belles fontaines.


Il ne nous restoit plus que quarante-deux milles jusqu’à Rome. Nous les commençâmes le lendemain par monter la montagne de Viterbo, fort longue mais non pas en-