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d’Italie ; surtout pour la beauté des vignes qui sont toutes montées sur des arbres dont elles recouvrent toutes les branches, puis, en retombant, elles retrouvent d’autres jets de vigne qui descendent de l’arbre voisin, avec lesquels on les rattache, ce qui forme, d’arbres à autres, des festons chargés de feuilles et de fruits. Tout le chemin est ainsi garni d’arbres plantés en échiquier ou en quinconce. Il n’y a point de décoration d’opéra plus belle ni mieux ornée qu’une pareille campagne. Chaque arbre, couvert de feuilles de vignes, fait un dôme de pavillon duquel pendent quatre festons, qui s’attachent aux arbres voisins. Les festons bordent la route de chaque côté et s’étendent, à perte de vue, en tous sens dans la plaine. Cette décoration n’a guère moins de vingt milles de long, qui est la distance de Vicence à Padoue. Le 26, avant que d’arriver à cette ville, nous passâmes la Brenta sur un pont distant de Padoue d’environ demi-lieue, et nous entrâmes par la porte Savonarola, dont l’architecture est fort prisée, aussi bien que celle de la porte Saint-Jean. Cependant l’une et l’autre m’ont paru au-dessous de celle que l’on nomme Del Portello, que vous ferez très-bien de voir en passant par ici.


LETTRE XIII

À M. DE NEUILLY


Mémoire sur Padoue.


28 juillet 1739.


Padoue m’a paru d’une figure en quelque façon triangulaire et fort étendue. Elle passe pour une des plus grandes villes d’Italie, et même plus que Venise, ayant au moins deux lieues et demi de tour ; mais on ne peut rien voir de plus pauvre, de plus triste, ni de plus dépeuplé. Le premier étage des maisons porte sur d’infâmes arcades basses et irrégulières, faites de méchantes pierres ou de plâtras qui bordent la rue de chaque côté. Cela a