Page:Charles d Orléans - Poésies complètes, Flammarion, 1915.djvu/239

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

De ne vous oublier me lie,
Autant en ce que puis et doy,
Que se me teniez par le doy.
     Or retournons à mon propos
Et ne parlons plus de cecy.
Vray est que je suis en repos
D’Amours, mais non pas de Soussy ;
Et pource, je vous vueil aussy
De me conseillier travaillier.
L’amy doit pour l’autre veillier.
     Soussy maintient que c’est raison
Qu’il ait sur tous vers moy puissance ;
Nonchaloir dit qu’en ma maison
Vault mieulx qu’il ait la gouvernance,
Car il ramenera Plaisance
Que Soussy a bannye à tort,
Sans reveillier le chat qui dort.
     Soussy respond qu’estre ne peut,
Tant qu’on est ou monde vivant,
Car Fortune par tout s’esmeut
Et est à chascun estrivant,
En tous lieux va mal escrivant,
Et toutes choses met en doubte ;
Elle a beaux yeulx et ne voit goute.
     Si ne sçay que je doye faire,
Ne lequel d’eulx me laissera :
Car veu que tousjours j’ay affaire,
Soussy jamais ne cessera.
Mais mon plaisir rabessera
En quelque place que je voyse ;
Bien est aise, qui est sans noyse.
     Quant en Nonchaloir je m’esbas
Et Dcsplaisir vueil debouter.
Jamais ne sçay parler si bas
Que Soussy ne viengne escouter.