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Se tenaient aux cheveux et s’assommaient de coups,
Les joueurs d’instruments, pour adoucir leur bile,
Touchaient le dorien, mode sage et tranquille,
Et qu’alors ces mutins, à de si doux accents,
S’apaisant tout à coup, rentraient dans leur bon sens ?
Elle se vante encor qu’elle eut une musique
Utile au dernier point dans une république,
Qui de tout fol amour amortissait l’ardeur,
Et du sexe charmant conservait la pudeur ;
Qu’une reine[1] autrefois pour l’avoir écoutée,
Fut près d’un lustre entier en vain sollicitée ;
Mais qu’elle succomba dès que son séducteur,
Eut chassé d’auprès d’elle un excellent flûteur,
Dont, pendant tout ce temps, la haute suffisance
Avait de cent périls gardé son innocence.
Avec toute sa pompe et son riche appareil,
La musique en nos jours ne fait rien de pareil.


Ce bel art, tout divin par ses douces merveilles,
Ne se contente pas de charmer les oreilles,
Ni d’aller jusqu’au cœur par ses expressions
Émouvoir à son gré toutes les passions
Il va, passant plus loin, par sa beauté suprême,
Au plus haut de l’esprit charmer la raison même.


Là cet ordre, ce choix et ces justes rapports
Des divers mouvements et des divers accords,
Le choc harmonieux des contraires parties,
Dans leurs tons opposés sagement assorties,
Dont l’une suit les pas de l’autre qui s’enfuit

  1. Clytemnestre.