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Allons sans différer dans ces aimables lieux,
De tant de grands objets rassasier nos yeux.
Ce n’est, pas un palais, c’est une ville entière,
Superbe en sa grandeur, superbe en sa matière ;
Non, c’est plutôt un monde, où du grand univers
Se trouvent rassemblés les miracles divers.
Je vois de toutes parts les fleuves qui jaillissent,
Et qui forment des mers des ondes qu’ils vomissent,
Par un art incroyable, ils ont été forcés
De monter au sommet de ces lieux exhaussés ;
Et leur eau, qui descend aux jardins qu’elle arrose,
Dans cent riches palais en passant se repose.
Que leur peut opposer toute l’antiquité,
Pour égaler leur pompe et leur variété ?


Naguère dans sa chaire, un maitre en rhétorique,
Plein de ce fol amour qu’ils ont tous pour l’antique,
Louant ces beaux jardins, qu’il disait avoir vus
On les prendrait, dit-il, pour ceux d’Alcinoos.
Le jardin de ce roi, si l’on en croit Homère,
Qui se plut à former une belle chimère,
Utilement rempli de bons arbres fruitiers,
Renfermait dans ses murs quatre arpents tout entiers.
Là se cueillait la poire, et la figue et l’orange,
Ici, dans un recoin, se foulait la vendange,
Et là, de beaux raisins sur la terre épanchés,
S’étalaient au soleil pour en être séchés.
Dans le royal enclos, on voyait deux fontaines,
Non s’élever en l’air superbes et hautaines,
Mais former à l’envi deux paisibles ruisseaux,
Dont l’un mouillait le pied de tous les arbrisseaux,
Et l’autre, s’échappant du jardin magnifique,