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Et pour n’en plus douter, qu’ils en sachent l’histoire.


Dans l’ile de Paphos fut un jeune étranger,
Qui vivait inconnu, sous l’habit d’un berger ;
La nature avec joie, et d’un soin favorable,
Amassant en lui seul tout ce qui rend aimable,
Avec tant d’agrément avait su le former,
Que ce fut même chose et le voir et l’aimer.
Des eaux et des forêts les nymphes les plus fières,
Sans attendre ses vœux, parlèrent les premières ;
Mais son cœur, insensible à leurs tendres désirs,
Loin de les écouter, méprisa leurs soupirs.


Entre mille beautés, qui rendirent les armes,
Une jeune bergère eut pour lui mille charmes,
El de ses doux appas lui captivant le cœur,
Eut l’extrême plaisir de plaire à son vainqueur ;
L’aise qu’elle sentit d’aimer et d’être aimée,
Accrut encor l’ardeur de son âme enflammée.
Soit que l’astre des cieux vienne allumer le jour,
Soit que, dans l’Océan, il finisse son tour,
Il la voit, de l’esprit et des yeux attachée
Sur le charmant objet dont son âme est touchée ;
Et la nuit, quand des cieux elle vient s’emparer,
Sans un mortel effort ne l’en peut séparer.
Pour la seconde fois, la frileuse hirondelle
Annonçait le retour de la saison nouvelle,
Lorsque, de son bonheur le destin envieux
Voulut que son berger s’éloignât de ces lieux.
La nuit qui précéda cette absence cruelle,
Il veut voir sa bergère, et prendre congé d’elle,
Se plaindre des rigueurs de son malheureux sort,
Et de ce dur départ, plus cruel que la mort.