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N’ont pas toujours trouvé des épouses bien sages ;
Mais auraient-ils le front d’en oser murmurer ?
Ont-ils, en épousant, tâché d’en rencontrer ?
Eux, et leurs vieux parents, n’ont avec leurs bésicles,
Pendant des mois entiers, lu, relu des articles,
Qu’afin de parvenir, par leur soin diligent,
À bien appareiller deux tas d’or et d’argent,
Sans regarder plus loin, sans voir si les parties,
D’esprit, d’âge et d’humeur seraient bien assorties.
Ils ne comprennent point que pour vivre content,
Le choix de la personne est le plus important ;
C’est une vérité qui leur semble bizarre,
Et qui n’entra jamais dans le cœur d’un avare.

Quand le premier mortel fut mis dans l’univers,
Pour commander lui seul à tant d’êtres divers,
Son œil, n’en doutons point, vit avec complaisance,
Ses richesses sans nombre, et sa vaste puissance ;
Mais, lorsque dégagé de son premier sommeil,
Le Seigneur lui montra la femme à son réveil,
La femme, sa moitié, sa compagne fidèle,
Quittant tout, il tourna tous ses regards sur elle,
Et, charmé de la voir, trouva moins de douceur
À régir l’univers, qu’à régner dans son cœur.

La gloire nous ravit par sa beauté suprême,
L’or nous rend tout-puissants et nous charme de même,
Mais, malgré tout l’éclat dont il frappe nos yeux,
Des biens, le plus solide et le plus précieux,
Est de voir pour jamais unir sa destinée
Avec une moitié sage, douce et bien née,
Qui couronne sa dot d’une chaste pudeur,