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Elle se fit si bien instruire,
Que son bon sens jamais embarrassé
Eut moins de peine à les conduire
Que ses brebis du temps passé.

Avant la fin de l’an, des fruits de l’Hyménée
Le Ciel bénit leur couche fortunée ;
Ce ne fut pas un Prince, on l’eût bien souhaité ;
Mais la jeune Princesse avait tant de beauté
Que l’on ne songea plus qu’à conserver sa vie ;
Le Père qui lui trouve un air doux et charmant
La venait voir de moment en moment,
Et la Mère encor plus ravie
La regardait incessamment.

Elle voulut la nourrir elle-même
Ah ! dit-elle, comment m’exempter de l’emploi
Que ses cris demandent de moi
Sans une ingratitude extrême ?
Par un motif de Nature ennemi
Pourrais-je bien vouloir de mon Enfant que j’aime
N’être la Mère qu’à demi ?

Soit que le Prince eût l’âme un peu mois enflammée
Qu’aux premiers jours de son ardeur,
Soit que de sa maligne humeur
La masse se fût rallumée,
Et de son épaisse fumée
Eût obscurci ses sens et corrompu son cœur
Dans tout ce que fait la Princesse,
Il s’imagine voir peu de sincérité.
Sa trop grande vertu le blesse,
C’est un piège qu’on tend à sa crédulité ;
Son esprit inquiet et de trouble agité