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ce sont de vains et ambitieux ornemens qui appauvrissent votre poëme au lieu de l’enrichir. Il en est de même, ajouta-t-il, des préparatifs qu’on fait pour le mariage du prince ; tout cela est oiseux et inutile. Pour vos dames, qui rabaissent leurs coiffures, qui couvrent leurs gorges, et qui allongent leurs manches, froide plaisanterie, aussi bien que celle de l’orateur, qui s’applaudit de son éloquence. — Je demande encore, reprit celui qui avait parlé le premier, que vous ôtiez les réflexions chrétiennes de Griselidis, qui dit que c’est Dieu qui veut l’éprouver : c’est un sermon hors de sa place. Je ne saurais non plus souffrir les inhumanités de votre prince, qui me mettent en colère : je les supprimerais. Il est vrai qu’elles sont de l’histoire ; mais il n’importe. J’oterais encore l’épisode du jeune seigneur, qui n’est là que pour épouser la jeune princesse : cela allonge trop votre conte. — Mais, lui dis-je, le conte finirait mal sans cela. — Je ne saurais vous dire, répondit-il ; je ne laisserais pas de l’ôter. »

À quelques jours de là, je fis la même lecture à deux autres de mes amis, qui ne me dirent pas un seul mot sur les endroits dont je viens de parler, mais qui en reprirent quantité d’autres. « Bien loin de me plaindre de la rigueur de votre critique, leur dis-je, je me plains de ce qu’elle n’est pas assez sévère : vous m’avez passé une infinité d’en-