Page:Charles Perrault - Oeuvres choisies, édition 1826.djvu/303

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Qui, d’elle autrefois amoureux,
Avait, avec le tems, purifié les feux
Dont son ame était embrasée :
Il en avait banni tout désir criminel ;
Et de cette odieuse flamme,
Le peu qui restait dans son ame
N’en rendait que plus vif son amour paternel.
Dès qu’il la vit : Que béni soit le ciel
Qui veut bien que je te revoie,
Ma chère enfant, dit-il ; et, tout pleurant de joie,
Courut tendrement l’embrasser.
Chacun à son bonheur voulut s’intéresser ;
Et le futur époux était ravi d’apprendre
Que d’un roi si puissant il devenait le gendre.
Dans ce moment la marraine arriva,
Qui raconta toute l’histoire,
Et par son récit acheva
De combler Peau-d’Âne de gloire.

Il n’est pas malaisé de voir
Que le but de ce conte est qu’un enfant apprenne
Qu’il vaut mieux s’exposer à la plus rude peine
Que de manquer à son devoir ;
Que la vertu peut être infortunée,
Mais qu’elle est toujours couronnée ;
Que contre un fol amour et ses fougueux transports,
La raison la plus forte est une faible digue,
Et qu’il n’est point de si riches trésors
Dont un amant ne soit prodigue ;
Que de l’eau claire et du pain bis
Suffisent pour la nourriture
De toute jeune créature,