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Une robe qui soit de la couleur du tems.
Malgré tout son pouvoir et toute sa richesse,
Quoique le ciel en tout favorise ses vœux,
Il ne pourra jamais accomplir sa promesse.

Aussitôt la jeune princesse
L’alla dire en tremblant à son père amoureux,
Qui dans le moment fit entendre
Aux tailleurs les plus importans,
Que s’ils ne lui faisaient, sans le trop faire attendre,
Une robe qui fût de la couleur du tems,
Ils pouvaient s’assurer qu’il les ferait tous pendre.

Le second jour ne luisait pas encor,
Qu’on apporta la robe désirée ;
Le plus beau bleu de l’empirée
N’est pas, lorsqu’il est ceint d’un beau nuage d’or,
D’une couleur plus azurée.
De joie et de douleur l’infante pénétrée,
Ne sait que dire, ni comment
Se dérober à son engagement.

Princesse, demandez-en une,
Lui dit sa marraine tout bas,
Qui, plus brillante et moins commune,
Soit de la couleur de la lune ;
Il ne vous la donnera pas.
À peine la princesse en eut fait la demande,
Que le roi dit à son brodeur :
Que l’astre de la nuit n’ait pas plus de splendeur,
Et que dans quatre jours, sans faute, on me la rende.

Le riche habillement fut fait au jour marqué,
Tel que le roi s’en était expliqué.