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plus réputés du même sang ; et que, n’y ayant point de prince de son nom, les peuples voisins pourraient leur susciter des guerres qui entraîneraient la ruine du royaume. Le roi, frappé de ces considérations, promit qu’il songerait à les contenter.

Effectivement il chercha, parmi les princesses à marier, qui serait celle qui pourrait lui convenir. Chaque jour on lui apportait des portraits charmans ; mais aucun n’avait les grâces de la feue reine : ainsi il ne se déterminait point. Malheureusement, il s’avisa de trouver que l’infante, sa fille, était non-seulement belle et bien faite à ravir, mais qu’elle surpassait encore de beaucoup la reine sa mère en esprit et en agrémens. Sa jeunesse, l’agréable fraîcheur de son beau teint enflamma le roi d’un feu si violent, qu’il ne pu le cacher à l’infante, et il lui dit qu’il avait résolu de l’épouser, puisqu’elle seule pouvait le dégager de son serment.

La jeune princesse, remplie de vertu et de pudeur, pensa s’évanouir à cette horrible proposition. Elle se jeta aux pieds du roi son père, et le conjura, avec toute la force qu’elle put trouver dans son esprit, de ne la pas contraindre à commettre un tel crime.

Le roi, qui s’était mis en tête ce bizarre projet, avait consulté un vieux druide[1] pour mettre la conscience de la princesse en repos. Ce druide,

  1. Prêtre des anciens Gaulois.