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sur un ton dolent. On ouvrit les boites, et l’on fut fort surpris d’y voir bien effectivement deux marmots qu’on trouva fort jolis. Riche-Cautèle se douta aussitôt que c’était encore un nouveau tour de Finette : il en conçut une fureur qu’on ne peut pas dire, et ses maux en augmentèrent à un tel point, qu’on vit bien qu’il fallait qu’il en mourût.

Bel-à-Voir en fut pénétré de douleur ; et Riche-Cautèle, perfide jusqu’à son dernier moment, songea à abuser de la tendresse de son frère. « Vous m’avez toujours aimé, prince, lui dit-il, et vous pleurez ma perte. Je n’ai plus besoin des preuves de votre amitié par rapport à la vie. Je meurs ; mais si je vous ai été véritablement cher, promettez-moi de m’accorder la prière que je vais vous faire. »

Bel-à-Voir, qui, dans l’état où il voyait son frère, se sentait incapable de lui rien refuser, lui promit, avec les plus terribles sermens, de lui accorder tout ce qu’il lui demanderait. Aussitôt que Riche-Cautèle eut entendu ces sermens, il dit à son frère, en l’embrassant : « Je meurs consolé, prince, puisque je serai vengé ; car la prière que j’ai à vous faire, c’est de demander Finette en mariage aussitôt que je serai mort. Vous obtiendrez, sans doute, cette maligne princesse, et dès qu’elle sera en votre pouvoir, vous lui plongerez un poignard dans le sein. » Bel-à-Voir frémit d’horreur à ces mots : il se repentit de l’imprudence de ses sermens ; mais il n’était plus