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son déguisement pendant tout le jour, parce qu’elles pourraient bien, si elles s’en avisaient, appeler du monde et le faire punir de son entreprise téméraire. Il conserva donc, toute la journée, les habits et le personnage de gueuse de profession ; et le soir, lorsque les trois sœurs eurent soupé, Riche-Cautèle jeta les haillons qui le couvraient, et laissa voir des habits de cavalier tout couverts d’or et de pierreries. Les pauvres princesses furent si épouvantées de cette vue, que toutes se mirent à fuir avec précipitation. Finette et Babillarde, qui étaient agiles, eurent bientôt gagné leur chambre, mais Nonchalante, qui avait à peine l’usage de marcher, fut en un instant atteinte par le prince.

Aussitôt il se jeta à ses pieds, lui déclara qui il était, et lui dit que la réputation de sa beauté et ses portraits l’avaient engagé à quitter une cour délicieuse pour lui venir offrir ses vœux et sa foi. Nonchalante fut d’abord si éperdue, qu’elle ne pouvait répondre au prince qui était toujours à genoux ; mais comme en lui disant mille douceurs et lui faisant mille protestations, il la conjurât avec ardeur de le recevoir pour époux dès ce moment-là même, sa mollesse naturelle ne lui laissant pas la force de disputer y elle dit nonchalamment à Riche-Cautèle qu’elle le croyait sincère, et qu’elle acceptait sa foi. Elle n’observa pas de plus grandes formalités que celles-là dans la conclusion de ce mariage ; mais