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ces deux sœurs, dans une éternelle oisiveté, ne faisaient jamais agir ni leur esprit, ni leurs mains.

La sœur cadette de ces deux princesses était d’un caractère bien différent. Elle agissait incessamment de l’esprit et de sa personne ; elle avait une vivacité surprenante, et elle s’appliquait à en faire un bon usage. Elle savait parfaitement bien danser, chanter, jouer des instrumens ; réussissait avec une adresse admirable à tous les petits travaux de la main qui amusent d’ordinaire les personnes de son sexe, mettait l’ordre et la règle dans la maison du roi, et empêchait, par ses soins, les pilleries des petits officiers ; car, dès ce tems-là, ils se mêlaient de voler les princes.

Ses talens ne se bornaient pas là ; elle avait beaucoup de jugement, et une présence d’esprit si merveilleuse, quelle trouvait sur-le-champ des moyens pour sortir de toutes sortes d’affaires. Cette jeune princesse avait découvert, par sa pénétration, un piège dangereux qu’un ambassadeur de mauvaise foi avait tendu au roi son père, dans un traité que ce prince était tout prêt de signer. Pour punir la perfidie de cet ambassadeur et de son maître, le roi changea l’article du traité ; et en le mettant dans les termes que lui avait inspirés sa fille, il trompa à son tour le trompeur même. La jeune princesse découvrit encore un tour de fourberie qu’un ministre voulait jouer au roi ; et par le conseil qu’elle donna à