Page:Charles Perrault - Oeuvres choisies, édition 1826.djvu/224

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Gardez qu’un peu de complaisance
Ne désarme trop tôt votre austère fierté ;
De votre juste défiance
Dépend votre repos et votre sûreté.

Mais je n’y songe pas, madame, j’ai fait des vers : au lieu de m’en tenir au goût de M. Jourdain, j’ai rimé sur le ton de Quinault. Je reprends le tour simple au plus vite, de peur d’avoir part aux vieilles haines qu’on eut pour cet agréable moraliseur[1], et de peur qu’on ne m’accuse de le piller et de le mettre en pièces, comme tant d’auteurs impitoyables font tous les jours.


Du tems des premières croisades, un roi de je ne sais quel royaume de l’Europe, se résolut d’aller faire la guerre aux infidèles, dans la Palestine. Avant que d’entreprendre un si long voyage, il mit un si bon ordre aux affaires de son royaume, et il en confia la régence à un ministre si habile, qu’il fut en repos de ce côté-là. Ce qui inquiétait le plus ce prince, c’était le soin de sa famille. Il avait perdu la reine son épouse, depuis assez peu de tems : elle ne lui avait point laissé de fils ; mais il se voyait père de trois jeunes princesses à marier. Ma chronique ne m’a point appris leur véritable nom ; je

  1. On sait que Perrault était en guerre avec Boileau, qui poursuivaitaussi Quinault.