Page:Charles Perrault - Les Contes de Perrault, edition Feron, Casterman, 1902.djvu/55

Cette page a été validée par deux contributeurs.

« Ma fille, demandez-en une,
Lui dit sa marraine tout bas,
Qui, plus brillante et moins commune,
Soit de la couleur de la lune ;
Il ne vous la donnera pas. »

A peine la princesse en eut fait la demande,
Que le roi dit à son brodeur :
« Que l’astre de la nuit n’ait pas plus de splendeur,
Et que dans quatre jours, sans faute, on me la rende ».

Le riche habillement fut fait au jour marqué,
Tel que le roi s’en était expliqué.
Dans les cieux où la nuit a déployé ses voiles,
La lune est moins pompeuse en sa robe d’argent,
Lors même qu’au milieu de son cours diligent
Sa plus vive clarté fait pâlir les étoiles.

La princesse, admirant ce merveilleux habit,
Était à consentir presque délibérée ;
Mais, par sa marraine inspirée.
Au prince importun elle dit :
« Je ne saurais être contente,
Que je n’aie une robe encore plus brillante
Et de la couleur du soleil. »

Le prince après avoir assemblé son conseil,
Fit venir aussitôt un riche lapidaire.
Et lui commanda de la faire
D’un superbe tissu d’or et de diamants,
Disant que, s’il manquait à le bien satisfaire.
Il le ferait mourir au milieu des tourments.
Le prince fut exempt de s’en donner la peine ;
Car l’ouvrier industrieux,
Avant la fin de la semaine,
Fit apporter l’ouvrage précieux.
Si beau, si vif, si radieux.
Que le blond époux de Climène,
Lorsque sur la voûte des cieux
Dans son char d’or il se promène,
D’un plus brillant éclat n’éblouit pas les yeux.