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l’impôt d’État sous toutes ses formes, impôt direct et impôt indirect, rogne leur salaire déjà deux fois rogné, non pas pour pourvoir seulement à des dépenses de civilisation et d’intérêt commun, mais pour assurer l’écrasant service de la rente au profit de la même classe capitaliste, ou pour entretenir de formidables et inutiles armées. Enfin, quand avec le résidu du salaire ainsi entamé, le prolétaire va acheter les denrées nécessaires à la vie de chaque jour, ou bien, faute de suffisantes avances et de temps, il s’adresse au détaillant, et il subit ainsi la charge de toute une organisation surabondante d’intermédiaires ; ou bien il s’adresse au grand magasin, au grand bazar, et il doit assurer, en sus des frais directs de manutention et de répartition de la marchandise, le bénéfice à dix ou douze pour cent du grand capital commercial. Comme la route féodale encombrée et coupée presque à chaque pas de droits de péage, la route de la vie est coupée, pour le prolétaire, par les droits féodaux de tout ordre que lui impose le capital. Il ne peut ni travailler ni se nourrir, ni se vêtir, ni s’abriter, sans payer à la classe capitaliste et propriétaire une sorte de rançon.

Et non seulement il est atteint dans sa vie même, mais il est atteint dans sa liberté. Pour que le travail soit vraiment libre il faut que tous les