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d’une véritable souveraineté nationale : la souveraineté populaire demeurait exposée à recevoir, sous une forme ou une autre, un souverain du dehors.

La victoire nous préservera, temporairement et relativement, de ce malheur. À quel prix ! Après quel maux ! Pour combien de temps ? Nous aurons l’occasion de le considérer. La paix fut le règne des déceptions. La déception fut si rapide et si profonde que la nouvelle Chambre, assez modérée, n’élut pas à la présidence de la République le chef du gouvernement du traité de paix : si M. Clemenceau avait incarné la bravoure française, son entourage avait inquiété par un esprit de jactance, de légèreté et de convoitise. Ses successeurs cédèrent, autant et plus encore qu’il n’avait fait, à l’habitude de nous subordonner aux Anglais. La politique de MM. Briand et Berthelot confina à la trahison, tant à la conférence de Washington qu’aux négociations engagées pour le Rhin. Ce furent quatre années honteuses, coupées par la semaine de gloire de Varsovie. Le retour de M. Poincaré aux affaires évita une catastrophe. Cette seconde expérience Poincaré comportait le programme qui aurait dû être exécuté quatre années plus tôt, mais ce programme était vicié par l’esprit de sa politique intérieure qui ouvrait l’avenir à des républicains amis de l’ennemi, partisans de l’inaction à tout prix : le gouvernement en perdait tout aspect de solidité et de permanence. Ainsi devaient fuir, entre les doigts de M. Poincaré lui-même, les résultats du rétablissement de 1912 : l’effort sauveur ne payait pas ! Ainsi devait être dégoûté même de la victoire un grand peuple chez qui la sensibilité intellectuelle, raisonnable ou non, égale, à coup sûr, la vivacité des nerfs et la force du cœur.

Pour résumer la succession d’événements de l’ère nationaliste et poincarienne qui va de 1912 à 1924, il faut donc concevoir une courbe élevée des fonds « abjects » du Combisme et du Caillautisrae jusqu’à la réorganisation déterminée par la loi de trois ans, sous le ministère Barthou. Mais la courbe subit une dépression brusque, fin 1913 (ministère Doumergue-Caillaux) ; les élections d’avril suivant l’accentuent, étant faites contre la « folie des armements[1] » ; mais l’événement extérieur

  1. Voir notre livre Les chefs socialistes pendant la guerre (N. L . N .).