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PRÉFACE DE 1909 3

le regardent que secondairement, l’assistance et l’enseignement, par exemple, quand il rejette par système le concours des particuliers dans l’ordre où ils sont compétents, l’argent doit lui manquer pour remplir les devoirs qui n’incombent qu’à lui. Mais l’élection oblige. Notre République élective est bien forcée de faire ses plus grosses dépenses dans l’opération qui lui donne le jour. Cela lui coûte cher. Ses prétendues lois sociales imposent une lourde charge et du reste n’apportent que des satisfactions fort maigres aux intéressés. Appliquées avec une injustice inévitable, ne pouvant desservir que la clientèle du Parlement, ces lois ont aggravé le mécontentement général. L’esprit public tarit. Le patriotisme est découragé. La désertion, l’insoumission, l’indiscipline militaire font des progrès. Les services d’Etat de plus en plus centralisés suscitent la révolte et la coalition de leurs fonctionnaires. Il en résulte un séparatisme moral, en attendant que les crises de séparatisme local se partagent le territoire. Le gouvernement des agitateurs nantis subit l’assaut de plus en plus violent, naturel et logique des agitateurs à nantir. Sa tyrannie contre les patriotes et les gens de bien n’a de mesure que son impuissance à l’égard de l’anarchie et de l’Étranger. Par sa faiblesse et par ses abus de pouvoir, ni la société ni la nation n’espèrent plus de tranquillité. L’avenir est au trouble, qui pénètre partout et croît chaque jour.

Les plus fâcheux pressentiments sont donc vérifiés et les hommes de l’âge de M. Rouvier peuvent déclarer que « la France se dissout ». Moins accessible à la pensée de la mort de tout un peuple, la plus récente génération commencera par se demander quelle cause précise dissout une société dont les membres ne sont nullement dissolus mais, au contraire, se sentent pleins de vigueur et débordent de vie. Il sera toujours temps de mettre en cause le pays. Avant de l’accuser, il convient au moins d’examiner son gouvernement. La question constitutionnelle se pose donc. Oui ou non, la démocratie républicaine est-elle apte à gérer l’intérêt national français ? Et si la raison et l’expérience répondent que non, quelle est donc la forme de monarchie appelée à remplacer la république ? Quelle est l’organisation générale appelée à remplacer la démocratie ?


II. — La méthode

Le seul mérite de l’Enquête que je réimprime en la complétant est de poser avec constance cette question préliminaire des rapports de l’État et de la patrie.

Ils sont étudiés en eux-mêmes, eu égard à la France seule, en faisant provisoirement abstraction de la volonté des électeurs français. Le sort de la nation, de laquelle dépend leur sort, est en jeu. On ne