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de l’Afrique belge : des malheurs de ses noirs livrés à l’esclavage.

Je veux surtout vous expliquer, comment il vous appartient à vous, catholiques, de remédier à tant de maux, dans un sentiment de religion, de pitié chrétienne et de patriotisme.

Pour vous y décider, je dois tout vous dire.

Vous ne vous étonnerez donc pas de la liberté de ma parole. Je suis un missionnaire ; je ne prêche que la vérité, comme la doivent prêcher des apôtres. Je suis sûr, d’ailleurs, quoi que je puisse vous dire, de ne vous point blesser. — J’en suis sûr parce que j’aime votre Belgique. Je l’aime pour sa foi généreuse. Je n’ai jamais trouvé chez elle, depuis de longues années, que des marques de sympathie et de charité pour mes œuvres. Si donc ce que vous entendrez peut quelquefois surprendre vos oreilles, vous comprendrez, au seul accent de ma voix, que je ne veux pas blesser vos cœurs.

Ce que je dois vous rappeler ou vous faire connaître, n’a rien d’ailleurs qui sorte des règles ordinaires. Je ne trouve, dans cette histoire du Congo belge, que ce que je trouve dans les histoires de toutes les nobles entreprises, et je ne puis mieux vous en donner la preuve qu’en vous montrant comment Notre Seigneur l’a racontée lui-même, il y a bientôt dix-neuf siècles, pour l’instruction future des peuples chrétiens.

Il a donné à cette leçon la forme d’un apologue. Vous le trouverez, si vous voulez le relire, dans l’Évangile de saint Matthieu.

Notre Seigneur y raconte qu’un homme sortit pour jeter dans les champs une bonne semence, bonum semen, mais la semence ainsi jetée par lui, ses gens s’endormirent et pendant qu’ils dormaient cum autem dormirent homines, l’ennemi sema l’ivraie au milieu du bon grain. L’ivraie ne tarda pas à croître de sorte que les serviteurs s’en effrayèrent et se repentant, sans doute, de leur négligence, ils se levèrent et dirent : « Voulez-vous que nous arrachions l’ivraie qui croit au milieu du bon grain ? »

Si vous l’entendez bien, c’est ce que je vais, sous des noms nouveaux, vous exposer aujourd’hui.