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aux Arabes et aux métis qui sont dans l’intérieur, le droit d’y porter désormais les armes.

On demandait un jour à un musulman esclavagiste comment il pénétrait dans le cœur de l’Afrique et quel était le souverain de ce pays. « Le souverain de l’Afrique intérieure, répondit-il en montrant son fusil, c’est la poudre ! »

Jamais réponse ne fut plus vraie et si ceux qui gouvernent ces immenses territoires ne le comprenaient pas, ils y verraient régner la barbarie.

Donc interdire le port des armes à feu, et, par conséquent, celui de la poudre aux Arabes et aux métis, qui seuls dirigent en Afrique la chasse à l’esclave, les punir, s’ils ne se soumettent pas, du bannissement immédiat, c’est tout le sang que je demande. Le bras des princes a, sans doute, le droit de le répandre pour salut social, mais l’Église ne le peut jamais et selon la maxime d’un de nos plus saints évêques de France, c’est en sachant mourir et non en versant le sang que la religion de Jésus-Christ s’est établie dans le monde.

Je le répète, défense aux Musulmans de porter, dans un État où d’ailleurs ils ne sont que des étrangers, des armes dont ils font cet horrible usage, le bannissement s’ils désobéissent, et, en peu de temps, tout l’intérieur de l’Afrique européenne sera débarrassé des trois ou quatre cents démons (ils ne sont pas davantage, en tout, dans toute l’Afrique intérieure, sachez-le) qui, assistés des noirs qu’ils ont formés et qu’ils traînent après eux, l’oppriment, la désolent et la couvrent de sang humain. J’en dis tout autant pour les nègres instruits à l’assassinat et je n’admettrais, du reste, personne, si j’avais une autre autorité que celle de la prière, à porter les armes dans le Congo belge, que ceux qui en auraient reçu mission ou du moins autorisation formelle de l’État. C’est là un principe de droit public. En Belgique et en France on le pratique à l’égard même de ceux qui, ne poursuivent que d’innocents oiseaux, et dans l’Afrique, par une aberration lamentable, on ne l’imposerait pas à ceux qui pratiquent publiquement la chasse impie !