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vagistes ; comment des monstres à face humaine, arabes et métis, ensanglantent par le meurtre, ravagent par l’incendie, épouvantent par la chasse et la vente des esclaves, toutes les parties du continent noir : au nord, jusque près de nos frontières sahariennes, dans les royaumes musulmans du Soudan ; à l’est, dans les régions qui avoisinent le Nil et l’Océan Indien ; au Zambèze, dans les pays qui touchent les provinces portugaises et les récentes colonies de l’Angleterre ; autour des grands Lacs de l’intérieur. Mais sur aucun point de l’Afrique, ces horreurs n’approchent de ce qui se passe sur les terres du Haut-Congo. Les explorateurs européens y ont été suivis, en effet, par les esclavagistes en quête d’une proie facile. C’est là que ceux-ci ont tout détruit dans des régions entières où il ne se trouve bientôt plus ni villages ni habitants.

On a récemment dressé, en Angleterre, une carte des pays à esclaves, et on y a distingué leur état actuel par des teintes diverses. Les teintes plus claires indiquent simplement l’existence de l’esclavagisme et de ses forfaits ; les teintes plus obscures marquent qu’il a tout détruit, dans une fièvre de fureur impie. Or il n’y a, dans toute l’Afrique, que cinq provinces marquées de cette couleur de mort, et ces cinq provinces se trouvent sur les rives du Haut-Congo. Je le dis avec une double douleur, Mes Très Chers Frères, car je suis le Pasteur de ces régions perdues et mes Missionnaires ont été les témoins de cette destruction de populations entières par la cruauté des musulmans et des métis.

Mais une affirmation générale ne peut suffire, il faut des preuves pour vous convaincre et vous décider à arrêter le mal sans délai, car l’œuvre de mort se continue et si vous tardez encore, les provinces voisines subiront le même sort.

Ces preuves je ne les emprunterai qu’à des témoins appartenant à la Belgique ou l’ayant servie au Congo.

Le Manyéma est la plus belle des régions récemment dépeuplées par l’esclavage. Livingstone qui l’avait parcouru, peu de temps avant de mourir, décrit ce pays admirable par sa beauté, par son climat, par ses productions naturelles (entre lesquelles on trouve l’or), par la densité de ses villages et de ses habitants.