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mérite réel ; j’indiquerai plus loin de quelle manière ce mérite sera constaté par le vote annuel de tous les cantons du globe sur les ouvrages à couronner.

Mais en montrant aux sciences fixes et aux arts la brillante carrière qui s’ouvre pour eux, quel ton dois-je prendre pour annoncer l’orage qui va fondre sur les vieilles idoles de la Civilisation, sur les sciences incertaines ? Faut-il revêtir les longs habits de deuil pour déclarer aux politiques et moralistes que l’heure fatale est sonnée, que leurs immenses galeries de volumes vont tomber dans le néant ; que les Platon, les Sénèque, les Rousseau, les Voltaire, et tous les coryphées de l’incertitude ancienne et moderne, iront tous ensemble au fleuve d’oubli ? (Je ne parle pas de leurs productions littéraires, mais seulement de ce qui touche à la politique et à la morale.)

Cette débâcle de bibliothèques et de renommées n’aura rien d’offensant pour le corps philosophique, si l’on considère que ses écrivains les plus célèbres ont cessé de vivre et n’endureront pas l’affront de déchoir. Quant à leurs disciples existants, ils ne doivent songer qu’à la fortune qui leur est préparée, qu’au plaisir de pénétrer enfin dans ce sanctuaire de la nature, dont leurs devanciers n’avaient pu s’ouvrir l’entrée.

Eh ! n’ont-ils pas de tout temps prévu le coup de foudre qui les menaçait ? J’en vois le pronostic dans leurs écrits les plus renommés, depuis Socrate, qui espérait qu’un jour la lumière descendrait, jusqu’à Voltaire, qui, impatient de la voir descendre, s’écrie : « Mais quelle épaisse nuit voile encore la nature ! »