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contre les passions et les richesses ; ce qui était amusant dans Athènes ne l’est plus à Paris ni à Londres. Il en est des sciences incertaines comme des modes, qui ne durent qu’un temps. La coterie des moralistes est à peu près éteinte ; isolée de la Religion et des sciences exactes, à peine ose-t-elle reparaître en s’affublant de quelques termes à la mode, comme les méthodes analytiques dont elle s’appuie encore, pour hasarder quelques verbiages sur les passions et leur lancer de loin un faible trait, semblable à ces vieillards qui, retirés au coin de leur feu, disent encore leur mot contre le siècle présent qui ne les connaît plus.

Si la Philosophie morale accuse notre siècle de perversité pour être insensible à ses charmes, il est aisé de lui prouver que son délaissement est le seul acte de raison dont ce siècle puisse se vanter. Une bizarrerie attachée à la doctrine de ses écrivains, c’est que les lieux où elle a été le plus enseignée sont ceux où elle a été le moins suivie. L’on cite Sparte et Rome pour foyers de la morale ; mais il n’y avait guère de moralistes à Sparte, où l’on ne voulut pas même souffrir Diogène, le grand prédicateur de la pauvreté. Il y avait encore moins de moralistes à Rome, dans le temps où Cincinnatus faisait cuire ses raves. Les hommes n’en valaient pas mieux pour être pauvres ; leur étalage d’austérité n’était qu’une intrigue de circonstance. À Rome, comme ailleurs, l’accroissement des richesses donna à l’ambition des formes plus raffinées ; à mesure que la Civilisation se développe, on voit l’austérité et la modération moins en honneur ; les efforts de la Philosophie pour ramener ces pruderies