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mandez au vertueux Sénèque pourquoi, lorsqu’il nous vante les douceurs de la pauvreté, il accumule pour ses menus plaisirs une fortune de 80 millions tournois (valeur actuelle) ; sans doute qu’il juge la pauvreté et la médiocrité plus belles en perspective qu’en réalité, comme ces statues mal dégrossies, qui font meilleur effet de loin que de près. Nous nous rangeons à l’avis de Sénèque ; que ne pouvons-nous comme lui renvoyer la pauvreté et la médiocrité dans la poussière des bibliothèques !

Lorsque vous attestez, par vos actions et par vos aveux, l’impuissance des secours que promet votre science, quelle intention doit-on vous prêter, si vous persistez à nous administrer ces inutiles secours ? N’est-ce pas une ironie de votre part que de vouloir nous familiariser avec les privations, quand nous vous demandons des richesses et des jouissances réelles ? Vous-mêmes, philosophes, dont l’esprit et les sens plus exercés que ceux du vulgaire vous rendent plus précieuses les douceurs de la fortune, n’êtes-vous pas ravis d’apprendre que la chute de vos systèmes va vous élever à cette fortune dont vous êtes idolâtres, en feignant de la mépriser ?

Ne répugnez point à confesser pleinement vos erreurs ; la honte en retombe sur les savants en masse, et non pas sur aucune classe en particulier. Croyez-vous que les physiciens et littérateurs puissent éviter leur part de l’affront universel ? N’avaient-ils pas, comme vous, le raisonnement et le bon sens pour apercevoir et dénoncer l’absurdité générale ? Oui, l’absurdité est générale tant que vous ne savez pas remé-