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au nom d’une Méthode présentée comme capable de produire énormément de Bien et de ne laisser que fort peu de Mal, pourra-t-on dire que cette critique de la Morale est une immoralité, c’est-à-dire une chose ayant pour but le triomphe du Vice sur la Vertu, le triomphe du Mal sur le Bien ?

Les habitants d’un pays fort arriéré cultivent leurs champs, de père en fils, d’après une Méthode qui leur donne quatre-vingt-dix-neuf pieds d’ivraie pour un pied de blé. Un homme survient qui, ayant longtemps étudié les lois de la Nature, a découvert une nouvelle Méthode. Il expose, en critiquant l’ancienne, que la Méthode nouvelle doit produire avec cent fois moins de travail quatre-vingt-dix-neuf beaux épis pour un brin d’ivraie. Il demande que dans le coin d’un champ on fasse l’expérience de sa Méthode. Or, voici que nos paysans s’ameutent contre cet homme et parlent de le lapider parce que, crient-ils, le misérable porte atteinte à la culture du blé, insulte les cultivateurs de blé et veut affamer la contrée…

Voilà pourtant l’histoire de Fourier et de ces Coryphées de la Morale et de la Philosophie qui déversent sur lui les flots de leur intelligente indignation, de leur sainte colère ! Mais, bonnes gens, prenez donc garde que si Fourier vous critique fort, c’est précisément parce qu’il n’y a que de l’ivraie dans vos champs et qu’il voudrait que l’on y fît enfin pousser le bon grain en abondance.

La Morale pose en principe que pour produire le Bien il faut comprimer et réprimer les Passions. Voilà sa donnée.