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idéal d’Harmonie qu’il prophétise, et dont il fait l’objet et la sanction de sa Doctrine !

Si Fourier rêve une Société trop belle pour être réalisable avec des hommes, s’il poursuit l’idée chimérique d’une perfection impossible ici-bas, que deviennent les accusations d’immoralité ?

Il faut s’entendre un peu. Qu’est-ce que le Bien ? Est-ce la Morale qui est le Bien ? Sont-ce les Théories des Moralistes qui sont le Bien ? — Assurément non, à notre sens. Que les Théories des Moralistes, leurs idées, leurs sermons sur la perversité de la Nature humaine, et sur la malfaisance essentielle et native des Passions, sur la nécessité de comprimer, de violenter celles-ci ; que ces Théories, attaquées par Fourier, leur aient été inspirées par le désir du Bien, qu’elles aient été considérées par ces Philosophes comme le Moyen, le seul Moyen de diminuer quelque peu le Mal ici-bas : voilà ce que nous ne contestons nullement. Mais ces Théories morales, fussent-elles de bonnes Méthodes pour réaliser le Bien social, n’en seraient cependant pas plus le Bien social lui-même, qu’une bonne Méthode agricole pour la culture du blé ne saurait être elle-même du blé.

Il résulte déjà de ceci que la Morale, qui n’est qu’une Méthode ayant pour objet la Production du Bien, peut être critiquée très vivement sans qu’il puisse être inféré de là que la critique est immorale, c’est-à-dire attentatoire au Bien lui-même. Et s’il se trouve que la Méthode morale pour la production du Bien est une méthode très fausse, réalisant très peu de Bien et énormément de Mal, et qu’on la critique