fixe, j’exerçais perpétuellement sur ses allées et venues une minutieuse surveillance. Je craignais, si je le perdais de vue un seul instant, qu’il n’allât porter des notes aux journaux et remplir du bruit de nos exploits prochains toutes les trompettes de la renommée. J’habitais avec lui, je l’accompagnais en tout lieu, chez les fournisseurs, chez les constructeurs. Jamais amant jaloux ne resta plus obstinément dans le sillage de sa maîtresse ! Naturellement, cette suspicion dont il s’était vite rendu comple l’exaspérait, et il se vengeait comme il pouvait, par exemple en cherchant, pour me les envoyer en pleine figure, les mots les plus cruels et les plus insultants :
— Tu as donc peur, me disait-il parfois, que je ne fasse danser l’anse du panier ? Mon pauvre ami, je plains tes cuisinières !
Pourtant le ballon fut terminé. Je revois Ceintras étalant des croquis devant mes yeux, couvrant le tableau noir de formules et de chiffres : « Ça doit marcher, » disait-il. À vrai dire, toute ma science se bornant aux souvenirs qui me restaient de mes années de lycée et aux menus profits que j’avais retirés, par la suite, de quelques conversations à bâtons rompus avec Ceintras, j’étais absolument incapable de faire subir par devers moi-même un examen critique sérieux aux