Page:Charles De Coster - Légendes Flamandes.djvu/36

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 12 —

contempteur de tout bien et vertu. Car c’est là traître et méchant conseil qu’il nous a baîllé. »

— « De fait, mon bon ami, de fait. Et n’est-ce point aussi hérésie grande de nous oser venir narrer que ce joufflu dessus sa pipe, a inventé bière, vin et cervoise, nonobstant qu’à chaque dimanche il nous a été prêché en l’église que saint Noé, par conseil de Notre-Seigneur Jésus-Christ (ci, à deux se signèrent), a inventé telles choses. »

— « Quant à ce qui est de moi, dit Blaeskaek. Je l’ai ouï plus de cent fois. »

Ci se séant sur l’herbe, commencèrent se repaître d’un beau saucisson de Gand, par Pieter Gans emmené en prévision de la faim à venir.

— « Là, là, dit-il, n’oublions point le Benedicite, mon ami. Et ainsi peut-être ne serons-nous point brûlés. Car c’est à Dieu que nous devons cette viande : qu’il nous doint de toujours demeurer en sa sainte foi. »

— « Amen, dit Blaeskaek ; mais, compère, il nous faudrait bien ensemble casser cette méchante statue. »

— « Las, las ! qui n’a point moutons à garder, ne craint point loups, — et tu parles à l’aise de casser ce diable. »

— « Ce serait acte bien méritoire. »

— « Mais s’il vient encore à chaque nuit lamentable-