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ANNALES DU MUSÉE GUIMET

de gazon, de ronces et d’arbustes, plongent ici dans l’eau profonde, tandis que là-bas c’est une plage couverte de blancs galets. Il contient un mouillage de plusieurs milles carrés, avec une profondeur d’eau de 6 à 10 brasses, et une marée qui ne monte et ne descend que de 2 pieds. »

La structure des maisons de Wôn-San est de style japonais, et, en fait, la plus grande partie de sa population est japonaise. On rapporte qu’il y a beaucoup d’or dans le pays environnant et qu’on exporte de là une quantité considérable de poudre de ce métal. On se livre aussi, à Wôn-San, à un grand commerce de fourrures et de peaux, les tigres et les léopards s’y trouvant en grand nombre.

Le 29 octobre, je fus reçu chez deux personnes hospitalières, le commissaire des douanes de Wôn-San et son assistant, qui me procurèrent un guide et deux chevaux de bât, et, avec ce simple moyen de transport pour moi et mes bagages, ou plutôt pour mes bagages seulement, car je fis presque toute la route à pied, je quittai Wôn-San. Je me rappellerai toute ma vie ce renvoi de mes domestiques pour faire, sans compagnie, un voyage dans un pays où un serviteur est presque le seul titre nécessaire pour être rangé parmi les Yang-Ban (nobles). J’ai à peine besoin de dire que je souffris d’abord des puces et de tous les autres insectes hémiptères, que je fus ensuite cuit au point d’en mourir dans les horribles chenils où je fus obligé de dormir pendant la nuit, et que je perdis enfin toute ma dignité en voyant que des coolies employaient, pour s’adresser à moi, l’expression « yo-po » (dis donc !), comme s’ils avaient affaire à un de leurs camarades.

Je traversai en route des placers et des mines d’or et j’atteignis le cours d’eau connu sous le nom de Han, qui passe près les murs de la capitale, que je suivis pendant 32 kilomètres depuis ses sources bouillantes dans les montagnes jusqu’à l’endroit où il s’élargit et se transforme en une fière et murmurante rivière.

Dans la matinée du 4 novembre 1888, j’entrai à Séoul.

Le 10 novembre et de rechef le 18 décembre, le roi m’invita à venir le voir en audience privée. Il s’intéressa beaucoup à mon voyage à Quelpaërt. Chose assez étrange, il ne connaissait rien ou presque rien de ce pays mystérieux et du peuple qui l’habite, et était curieux d’avoir à ce