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LA CORÉE OU TCHÖSEN

visites, entre autres celles de beaucoup de personnages de la classe officielle, affligés de maladies de foie, de fièvres gastriques, d’ophtalmies et de syphilis. À Tchae-Tchiou, comme dans l’Afrique centrale, une boîte bien garnie de médicaments est la meilleure arme pour détruire les préjugés d’un peuple sauvage. Malheureusement, mon stock de remèdes fut bientôt épuisé et je fus dès lors forcé de mystifier ceux qui venaient me consulter, en leur donnant des préparations inoffensives que je pus faire (avec de l’eau de mer comme base). L’ordre transmis au capitaine de partir aussitôt que le vent aurait changé, donna une nouvelle vie à mon équipage ainsi qu’à Kim et à Tchong qui étaient plus ou moins inquiets. Il ne fallait pas non plus oublier notre vieux pilote Yang Man Touk, qui avait pris place parmi nous de force et qui avait été, s’il faut en croire ses dires, chassé du pays et menacé violemment parce qu’il nous avait amenés à Quelpaërt. Je le fis venir et lui proposai de le conduire à l’extrémité orientale de l’île d’où il pourrait, sans obstacle, gagner sa maison qu’il disait être située dans l’intérieur. Je lui donnai une certaine somme d’argent en sapèques (petites monnaies de cuivre enfilées dans une corde) qu’il enroula autour de son corps, en me faisant le k’ot’éou (salutations) à plusieurs reprises, et en m’avouant qu’il n’avait jamais été possesseur d’une aussi forte somme. Il insinua ensuite qu’il irait silencieusement à terre la nuit venue et se dirigerait vers la demeure d’un ami ; il n’était pas effrayé, disait-il, il ne lui arriverait pas malheur. Et il s’en alla comme il l’avait dit.

Le 3 octobre, à 3 heures du matin, le capitaine me réveilla. Le vent, disait-il, avait changé et était favorable. « Partons, capitaine », lui répondis-je. Notre barque, éclairée par un brillant clair de lune, sortit alors tranquillement du port ; grâce à une bonne et forte brise, elle pressa son allure dans sa course vers le continent. Au coucher du soleil, nous gagnâmes sans encombre le point sous le vent du groupe Soando et, tournant vers le nord-est, nous continuâmes notre route durant la nuit et le jour suivant.

Le 5, nous entrâmes dans le petit port de Madjamok pour prendre de l’eau fraîche.

Le 6, nous étions à To-yong, un superbe port, magnifiquement situé. De ce point, le rivage offre une succession de jolis petits villages qui sont une preuve de la prospérité du pays.