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son infériorité sur la généralité de ses sœurs était certaine. Dans tous les romans qu’elle dévorait hâtivement maintenant, elle voyait toujours une femme amoureuse et un mâle éperdu. Elle ne remarquait point les circonstances qui expliquaient l’exaltation de ces passions, le fait brutal la frappait seul. Elle ne pouvait donc sortir de ce dilemme : ou toute la littérature n’était que mensonge, ou bien, conformée autrement que les autres, elle n’éveillait pas chez l’homme cet amour extraordinaire qu’elle attendait toujours. De nouveau, elle se replia sur elle-même, comme jadis au foyer maternel, et son imagination devint tout elle-même, ne laissant rien à la logique ou au sentiment. Vaguement, elle attribuait aussi son échec à René et le détesta un peu plus, tout en le méprisant secrètement parce qu’il n’avait pas su créer en elle cette passion exorbitante qu’elle appelait l’amour.