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part de l’argent qui passe de mains en mains pour aller de l’un à l’autre, est la grande affaire, l’affaire par excellence de ce qu’on appelle généralement un homme d’affaires. Cela demande de la finesse, de l’audace, et surtout une fermeté que n’atteint ni les douleurs des pauvres, ni les reproches et les insultes du riche, quand la spéculation a manqué… Aussi la figure sèche, sordide, amère, de la plupart des hommes d’argent vous glace-t-elle rien qu’à son aspect et vous les fait deviner entre mille dans un endroit public.

Mais l’impression produite à la vue de M. Norbach était bien différente de celle-là. Sa figure douce, noble et pâle, portait le cachet de la bonté et de la mélancolie. Au moment où nous le dépeignons ici, c’était un homme qui approchait de cinquante ans. Sa taille était élevée, ses mouvements pleins de distinction, et sa physionomie, quoique empreinte d’une profonde tristesse, avait quelque chose de sympathique qui prévenait en sa faveur au premier moment. Assis devant son immense bureau, qui était couvert de papiers de toutes sortes, M. Norbach ne semblait en voir aucun. Son regard fixe ne se posait sur rien, tant son attention était absorbée par ses sentiments intérieurs. Évidemment, il cherchait dans son esprit des ressources pour sortir d’un embarras cruel ; mais, sans doute, il n’en trouvait pas, car son front s’assombrissait davantage avec la ré-