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un vieux piano, une petite bibliothèque, quelques chaises, deux tables et un poêle. Tout cela était pauvre, mais propre et rangé. Parfois Mme Robert (c’est le nom des cerbères de la porte, comme les appelaient les locataires mécontents de la rectitude de leur vigilance), Mme Robert montait parfois, en l’absence d’Antonia, pour voir si son logement n’avait pas besoin de quelques soins de sa part, mais la propreté d’ordinaire brillait toujours. C’était une habitude de la pauvre fille. Mme Robert regardait tout avec intérêt. Alors seulement on pouvait apercevoir quelque chose de tendre et de féminin sur le visage aux formes masculines de la portière. M. et Mme Robert était bien assortis, pour la taille du moins, car Robert avait servi jadis dans les grenadiers ; et, à l’aspect de sa compagne, on aurait pu penser qu’il avait pris pour femme un de ses anciens camarades, si un embonpoint des plus développés eût pu laisser le moindre doute sur le sexe de Mme Robert. Mais dans l’obscurité, on avait des soupçons ; le son de sa voix était formidable, et la force de son poignet eût contenu le malfaiteur le plus subtil qui aurait voulu s’introduire malgré elle par la porte qu’elle défendait. C’était sur cette belle apparence du couple Robert, et sur l’avantage qu’il possédait de n’avoir ni enfants, ni chiens, ni belle-mère, que le propriétaire les avait acceptés, à la recommandation du curé de l’église Saint-Philippe