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quelques-unes de ces magnificences, car ce n’est pas une des moindres curiosités de Paris que de voir le même toit recouvrir les fortunes et les situations les plus diverses, les plus splendides existences et les plus cruelles misères.

Le premier étage possédait un large balcon, dix fenêtres sur l’avenue des Champs-Élysées, deux salons immenses et dorés, et le reste du logement répondait à ces magnifiques pièces de réception. C’était loué une somme considérable à des Américains qui se préparaient à recevoir la société parisienne pendant cet hiver de 1856 ; c’est-à-dire à entasser chez eux ces oisifs du monde parisien qui n’ont pus assez de cœur et d’intelligence pour se faire des occupations et des amitiés, et qui demandent à tout venant de les amuser, parce qu’ils préfèrent à l’ennui solitaire et paisible, l’ennui qui fait du tapage et que l’on supporte en commun.

Ces Américains avaient cinq filles de neuf à vingt ans ; les deux aînées sortaient souvent seules, allaient à cheval au bois, avec des hommes de leur connaissance, et recevaient chez elles des jeunes gens. C’étaient les habitudes anglaises avec un peu d’exagération, car les vastes États de l’Union sont peuplés d’habitants différents d’origine, qui ont gardé chacun quelque chose du pays d’où ils sont sortis, bien qu’ils aient vécu depuis sous une loi commune. Au reste, cette coutume de liberté est