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LES DÉMONIAQUES DANS L’ART.

Jesus spiritum immundum et sanavit puerum (Luc., cap. ix) ». La scène se passe dans un paysage de convention où les colonnades, statues et motifs architecturaux tiennent la plus grande place. Le personnage du possédé n’est pas moins conventionnel que le reste. Il est maintenu par un homme à demi agenouillé, et de sa bouche s’échappe un nuage de fumée au milieu duquel on voit un petit diable.


LE JEUNE POSSÉDÉ

FIGURE DANS LA TRANSFIGURATION DE RAPHAËL (1520). MUSÉE DU VATICAN

Dans son tableau de la Transfiguration, Raphaël nous montre un jeune démoniaque en état de crise. Cette toile, la dernière qu’il ait peinte, est regardée, par ses panégyristes, comme son chef d’œuvre le plus achevé et l’expression la plus haute de son génie. « On peut la considérer, dit M. Eugène Müntz, comme son testament artistique. »

Notre seule intention est d’étudier la figure du jeune possédé, et de rechercher de quelle manière Raphaël a représenté la possession démoniaque.

Il est intéressant de relever ici que, dans le texte sacré qui a fourni à l’artiste le sujet de sa composition, le jeune malade est désigné sous le nom de « lunatique ». Le récit du père relève quelques détails qui sont caractéristiques des crises de l’épilepsie : « Seigneur, ayez pitié de mon fils qui est lunatique, et qui souffre cruellement, car il tombe souvent dans le feu ou dans l’eau… » Il se pourrait donc que Raphaël, sans chercher à représenter un possédé du démon, ait voulu peindre un véritable malade atteint de crises nerveuses, un lunatique.

Quoi qu’il en soit, nous ne retrouvons dans cette figure aucun des caractères précis soit de l’épilepsie, soit de l’hystérie. Nous ajouterons même que, du moins à notre sens, elle ne répond à aucune autre maladie convulsive connue.

Déjà un physiologiste éminent, Sir Charles Bell, a porté sur ce Possédé quelques appréciations, fort judicieuses à notre avis. Il met en parallèle deux peintures de démoniaques : celle de Raphaël et celle du Dominiquin dont il sera question plus loin, et il n’hésite pas à décerner la palme à ce dernier.

« Cette figure, dit-il en parlant du démoniaque de Raphaël, n’est pas naturelle. Un médecin conclurait en la voyant que le jeune homme feint un mal qu’il n’éprouve pas. Jamais enfant n’eut des convulsions semblables… »

Nous ne pouvons que souscrire à ce jugement. Dans la partie supérieure du corps, qui seule