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LES DÉMONIAQUES DANS L’ART.

brisés plutôt que de leur faire lâcher prise ; tous ses membres avaient la rigidité de la pierre. Saint Joseph de Copertino poussait un cri, tombait à genoux y les bras étendus en croix, aucun souffle ne sortait plus de sa bouche, etc.

Tous ces phénomènes de l’extase se retrouvent dans l’hystérie ; ces rigidités, ces contractures sont d’apparence éminemment hystérique. Pour n’en citer qu’un exemple, je rappellerai que Ler…, une de nos malades, dans ses attaques d’extase, était entièrement rigide, les bras étendus dans l’attitude du crucifiement.

Mais nous voyons que les artistes, dans les représentations qu’ils ont faites des extatiques, ont négligé à dessein toute apparence de violence, tout phénomène convulsif. Pour eux l’extase est une pose expressive, une pure attitude passionnelle ; tous leurs efforts consistent à exprimer, à rendre extérieur un phénomène interne, en un mot à traduire objectivement, par les traits de la physionomie et les gestes du corps, ce qui se passe dans les régions de l’esprit inaccessibles à la vue.


SAINTE CATHERINE DE SIENNE EN EXTASE
Fragment d’une fresque de Sodoma dans l’église Saint-Dominique à Sienne.

C’est ainsi que, pour citer quelques exemples, l’extase revêt les signes extérieurs d’une prière ardente, comme dans une fresque de Sodoma représentant Sainte Catherine de Sienne intercédant pour l’âme du supplicié Strozzi ; de la surprise, de l’admiration, comme dans une autre fresque du même peintre montrant Sainte Catherine en extase ; du calme, de la joie intérieure, du ravissement, comme dans les Immaculées conceptions de Murilio et de l’école espagnole ; de la contemplation, comme dans le tableau de Murilio, Saint François en extase ; de l’amour possédé et