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ET LES JOURS

une de ses sœurs, à Montréal. Au fond de son cœur, elle espère qu’une absence améliorera ses relations avec son fils. Mais au bout d’une semaine, ne tenant plus en place, elle revient.

Partie en santé apparemment, Eugénie revient l’ombre d’elle-même. Le voyage l’a beaucoup fatiguée, mais le chagrin la mine encore plus. À son retour, elle s’est mise au lit. Le docteur vient tous les jours lui donner des piqûres. « Elle n’a plus de sang », dit-il.

Quand elle était malade, dans sa jeunesse, elle a eu les maîtres de la profession, puis d’autres moins sûrs et, à sa mort, elle n’a qu’un médicastre quelconque qui porte une chemise d’une blancheur douteuse et dont toute la personne respire la table frugale et le réduit malpropre.

À mesure que sa fin approche, Eugénie semble avoir peur de Pierre ; elle ne veut pas rester seule avec lui. Quand il est là, ses yeux se remplissent de terreur. Elle ne parle plus. Quand elle appelle, ce n’est jamais lui.

L’agonie est commencée. La conscience d’Eugénie semble s’éclairer de lueurs nouvelles à mesure que ses forces déclinent. Elle s’interroge sur sa conduite à l’égard de Pierre par qui elle a souffert. La malheureuse en arrive