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LES DÉSIRS

trop longue. Pierre sent son sang-froid le quitter.

— Attends-moi un instant, dit-elle, en sor­tant de son réticule un petit nécessaire de toi­lette.

Il parle pour conjurer la magie de ce corps et pour ne pas se laisser aller au trouble qui l’émeut jusque dans les lombes. Il lui tend les bras pour l’aider à se lever, mais elle décline son assistance et reste devant lui, provocante.

— Allons au cinéma, dit-il.

Ce soir-là, en revenant rue de la Manufacture, Pierre Massénac se sent déborder de joie. Main­tenant qu’il est seul, le jeune homme repasse dans son esprit les mots, les gestes de Germaine, il leur trouve un langage secret, et s’exalte à la pensée qu’il la reverra souvent.

Pierre et Germaine dansent ensemble tous les soirs mais ils sont toujours aussi étrangers que le jour où Auguste les a présentés l’un à l’autre. Quand Pierre n’arrive pas le premier, la jeune fille ne l’attend pas ; elle part avec un autre. Le jeune homme souffre de cette indiffé­rence irritante.

En dépit de ses allures, du plaisir qu’elle éprouve à danser tous les soirs, Germaine est