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ET LES JOURS

pouvait manquer d’apprécier les plats, le ser­vice, la propreté du linge, mais pour peu qu’il fût perspicace, il devinait qu’il se passait au­tour de lui plus de choses qu’on n’en pouvait voir sans indiscrétion. Le nombre des serveuses, les frôlements discrets, la prédilection des arri­vants pour certaines tables, cette familiarité que la communauté de plaisir établit entre les initiés venaient confirmer cette impression.

Derrière la caisse, dissimulée au fond de la salle, s’ouvrait un couloir conduisant aux sa­lons particuliers. Dès l’entrée de ces pièces un luxe insolent bravait le regard. Des tentures, rappelant ces maisons où les bourgeois de la fin du siècle aimaient à s’amuser, lambris­saient les murs ; un escalier, couvert de rouge, conduisait à un passage discrètement éclairé qui s’ouvrait du côté de la rivière sur une vaste salle de jeu et du côté de la rue sur une série de petits salons particuliers.

Monté depuis quelques instants, Sam Lavisse, qui s’était arrêté devant un tableau re­présentant une scène galante, fut rejoint par Maître Bourret.