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LES DÉSIRS

Auguste suit Claude dans le petit verger, planté de trois rangées de pommiers crochus, couverts en ce moment de fleurs blanches.

Il ne comprend pas la distinction que sa mère vient de faire. Dans les récits qu’on lui raconte, il y a des pauvres et des riches. Ces compromis entre richesse et pauvreté le laisse pensif.

Auguste ne tarde pas à se familiariser avec son nouveau pays. Tenant Claude par la main, il s’aventure dans la rue. Ils jouent, en marchant, à traîner la main sur les barreaux plats des clôtures à claire-voie qui séparent les propriétés du trottoir. Quand la clôture s’éloigne, ils descendent pour ne pas perdre contact avec le bois. Ils se croiraient perdus s’ils manquaient un seul barreau. Ils amassent en chemin tout ce qui peut devenir une collection : Claude, les noyaux de fruits, les clous ; Auguste, les enveloppes de cigarettes. Ils vont ensuite cacher leur butin dans un coffre, au fond de l’écurie. L’intérieur de cette bâtisse, rafistolé avec des moyens de fortune, a été aménagé en salle de jeux pour les jours de pluie et, par les soins d’un électricien, ami des Prieur, un téléphone, alimenté par des piles, fonctionne entre cette pièce et la cuisine.